« Nous voulons que dorénavant tous les arrêts ainsi que toutes autres procédures, […] soient prononcés, publiés et notifiés aux parties en langue maternelle française, et pas autrement ».
L’article 111 de l’ordonnance de Villers-Cotterêts vient de connaitre sa première dérogation depuis sa promulgation en 1539.
Le 4 juin 2018 s’est en effet tenu la première audience de mise en l’état de la chambre internationale de la Cour d’appel de Paris (CICAP). Cette nouvelle juridiction, instituée le 7 février 2018 a pour objet de permettre une plus grande attractivité de la juridiction parisienne et une plus grande flexibilité dans le traitement des litiges internationaux.
Quelle est sa compétence ?
La CICAP a pour objet le règlement des litiges qui « mettent en jeu les intérêts du commerce international ». Elle connaitre des litiges soumis au droit français comme à un droit étranger, de même, la cour appliquera au fond le droit français ou le droit étranger applicable à la cause. Sa compétence pourra en outre résulter d’une « stipulation contractuelle attribuant compétence aux juridictions situées dans le ressort de la cour d’appel de Paris ».
La chambre est en outre le second degré de juridiction de la chambre internationale du tribunal de commerce de Paris, créée en 1995.
Quel est son apport principal ?
L’apport principal de cette nouvelle juridiction est procédural. En effet, les audiences peuvent se tenir dans une langue étrangère choisie par les parties, il s’agira généralement de la langue anglaise. Les parties, mais aussi les experts et les conseils des parties peuvent s’exprimer en anglais.
Les pièces versées au débat peuvent l’être en anglais sans avoir à être traduites. Si elles sont versées dans une autre langue elles devront être traduites.
Néanmoins et en vertu de l’ordonnance de Villers-Cotterêts les actes de procédures sont rédigés en français. De la même façon l’arrêt de cette nouvelle chambre sera rendu en français mais systématiquement accompagné d’une traduction jurée en anglais rédigée par le greffe.
Afin de garantir l’effectivité de ces innovations, la chambre sera composée de magistrats qualifiés pour entendre les débats en anglais et mener la procédure dans cette langue.
Qu’en est-il de la procédure ?
La procédure se veut plus flexible, ainsi aux termes du protocole définissant la procédure devant la chambre internationale de la Cour d’Appel de Paris du 7 février 2018, les parties fixent avec le conseiller de la mise en état un calendrier de procédure qui peut être modifié en cours de procédure.
Cette audience n’interrompt cependant pas le délai de 3 mois prévu par le code de procédure civile pour la signification de conclusions de l’intimé.
Ce calendrier bénéficie d’une grande souplesse, en effet, le conseiller de la mise en état fixe, notamment les dates des plaidoiries, a date de l’ordonnance de clôture et la date à laquelle l’arrêt de la cour sera prononcé.
Plus internationale, plus proche du modèle arbitral et plus accessible aux plaideurs internationaux, la chambre internationale se veut une alternative sérieuse aux tribunaux anglais affectés par la sortie de l’Union européenne du Royaume-Uni et entend placer Paris devant ses concurrents allemands et néerlandais.
E. Maitenaz (stagiaire)