Par son avis du 10 juin 2020, la Cour de cassation pose une nouvelle solution : l’erreur ou l’omission du TEG n’entraîne que la déchéance des intérêts dans une limite que le juge fixe en tenant compte de la gravité de la faute du prêteur et du préjudice subi par l’emprunteur.

 En outre, elle confirme les solutions récentes concernant le calcul des intérêts contractuels sur 360 jours et le taux de période.

Avis n°15004 du 10 juin 2020 – Première chambre civile – n° 20-70.001 – PBRI

 

La Cour de cassation a statué le 10 juin 2020 sur la demande d’avis dont elle avait été saisie par le tribunal judiciaire de Rennes.

Cet avis, qui ne concerne que les crédits immobiliers, comporte de nombreux enseignements ainsi que d’importants rappels qui confirment les avancées jurisprudentielles récemment obtenues en matière de taux effectif global et de calcul des intérêts contractuels. Les questions posées par le tribunal judiciaire concernaient aussi bien le contrat de prêt (1) que son éventuel avenant (2).

La Cour de cassation a entendu conférer une large portée à cet avis qui a été mis en ligne sur le site internet de la juridiction et qui sera publié non seulement au Bulletin d’information ainsi qu’au Bulletin civil mais également au rapport annuel.

 

Le contrat de prêt immobilier

L’avis distingue suivant que l’erreur dénoncée par l’emprunteur porte sur le taux effectif global (a) ou bien les intérêts conventionnels (b).

  • Le taux effectif global

La question était ici de savoir si l’ordonnance du 17 juillet 2019, qui prévoit une nouvelle sanction en matière de TEG dans les contrats de crédits, s’applique de manière rétroactive ou non (questions n° 1 et 2). La Cour de cassation a répondu que l’ordonnance n’est pas applicable aux contrats conclus antérieurement à son entrée en vigueur.

Mais dans le même temps, la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence concernant les contrats conclus antérieurement à l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 17 juillet 2019 : désormais, l’inexactitude ou l’omission du TEG contenu dans ces contrats est également sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts dans la proportion librement fixée par les juges du fond (voir l’arrêt du 10 juin 2020, n° 18-24.287, à paraître au Bulletin, cité dans l’avis).

Autrement dit, la sanction est la même dans tous les cas de figure : par application de l’ordonnance pour les contrats conclus postérieurement à ce texte, en vertu de la nouvelle jurisprudence s’agissant des contrats antérieurs.

La haute juridiction donne une portée très large à sa nouvelle jurisprudence puisqu’elle concerne aussi bien l’inexactitude que l’omission de TEG que l’erreur commise dans l’offre préalable de crédit que celle affectant l’acte de prêt.

  • Les intérêts contractuels

En réponse à la question n° 7, la Cour de cassation rappelle que la sanction applicable au calcul des intérêts contractuels d’un crédit immobilier sur la base d’une année de 360 jours réside, non plus dans l’annulation du taux conventionnel, mais dans la déchéance du droit aux intérêts librement modulable par les juges du fond. L’avis cite et donc confirme une jurisprudence récente (1ère civ. 11 mars, Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Savoie c/ M. T… C., n° 19-10.875, à paraître au Bulletin).

Elle a ensuite précisé les termes de cet arrêt du 11 mars quant aux conditions de prononcé de la déchéance : l’écart supérieur à la première décimale porte sur le TEG, non sur le taux conventionnel (réponse à la question n° 8).

 

L’avenant

La Cour de cassation, suivant là encore notre raisonnement, a estimé que la sanction encourue de l’inexactitude du TEG figurant dans l’avenant au prêt réside également dans la déchéance du droit aux intérêts dans la proportion que fixe le juge.

L’on observera que s’agissant de l’avenant, le juge n’a pas à tenir compte du préjudice subi par l’emprunteur.

La solution s’applique également « en cas d’erreur affectant le calcul du taux conventionnel ». Cette expression inappropriée vise, à notre avis, le recours au diviseur 360 (réponse à la question n° 9). Ce résultat n’était nullement acquis d’avance en l’absence de jurisprudence relative à cette question.

Enfin, la Cour de cassation a rappelé que la mention du taux de période n’est pas requise dans l’avenant (1ère civ. 5 février 2020, M. A… X… et autres c/ Banque populaire occitane, n° 18-26.769, à paraître au Bulletin).