Com., 9 février 2022, pourvoi n° 19-21.942

La sous-caution est, selon l’article 2293 du code civil, celle qui s’oblige envers la caution à lui payer ce que peut lui devoir le débiteur à raison du cautionnement. Dit autrement, le sous-cautionnement garantit le paiement par le débiteur principal des sommes dues par ce dernier à la caution après que celle-ci a exécuté son engagement. Cette définition, issue de la réforme des sûretés de 2021[1] reprend celle qu’en avaient donné tant la doctrine [2] que la jurisprudence [3].

Aussi précise soit-elle, cette définition ne règle pas toutes les difficultés et notamment pas celle de savoir si la sous-caution peut être poursuivie après l’expiration de la durée de son engagement. La Cour de cassation y répond par l’affirmative dans cet arrêt de principe destiné à être publié au Bulletin civil des arrêts de la Cour de cassation.

A l’occasion de ventes en l’état de futur achèvement consenties par une société civile de construction vente (SCCV), une compagnie d’assurance avait délivré une garantie de parfait achèvement [4]. Elle avait par ailleurs obtenu le sous-cautionnement par les dirigeants de la SCCV, pour une durée expirant le 30 septembre 2012. Le chantier ayant été arrêté, la compagnie d’assurance a exécuté la garantie de parfait achèvement, postérieurement au 30 septembre 2012, puis elle a appelé la sous-caution, la SCCV ayant été placée en liquidation judiciaire.

En défense, la sous-caution a fait valoir que la durée de son engagement était expirée lorsque la compagnie d’assurance a exécuté son engagement. La cour d’appel n’ayant pas suivi cette thèse, la sous-caution s’est pourvue en cassation. La compagnie d’assurance, représentée par le cabinet, a obtenu le rejet de ce pourvoi.

Pour trancher la question posée par le pourvoi, la Cour de cassation s’est prononcée sur la date à laquelle est née la dette garantie par la caution, puis sur la date de naissance de la dette garantie par la sous-caution.

La Cour de cassation a d’abord rappelé que l’obligation de garantie de la caution, qui ne devient exigible que dans l’hypothèse où le débiteur principal (la SCCV) ne remplit pas ses obligations envers son créancier (l’acheteur), a pour objet de couvrir les dettes que le débiteur a contractées pendant la période de couverture de cet engagement. Elle prend donc naissance à la date à laquelle le débiteur principal contracte ces dettes.

La haute juridiction a ensuite jugé que l’obligation de la sous-caution, qui a pour objet de garantir la caution contre le risque de ne pas pouvoir obtenir du débiteur principal le remboursement des sommes qu’elle a payées pour son compte en exécution de son propre engagement, prend naissance à la même date et couvre l’intégralité de ces sommes, peu important la date de leur exigibilité et le fait que les paiements ont été effectués par la caution après l’expiration de la période de couverture de l’engagement de la sous-caution.

La haute juridiction a ainsi, d’une part, approuvé la cour d’appel en ce qu’elle avait énoncé que ce n’est pas la date à laquelle le paiement avait été réclamé aux sous-cautions qui devait être prise en compte pour dire si elles étaient tenues ou pas, mais celle de la naissance de l’obligation garantie par la caution.

Elle a, d’autre part, retenu que les sommes payées par la caution à la suite de la défaillance des sociétés civiles de constructions ventes concernaient des contrats de vente en l’état futur d’achèvement conclus avant le terme des sous-cautionnements litigieux, de sorte que les créances avaient pris naissance avant l’expiration des cautionnements.

Muriel Calisti

 

[1] article 3 de l’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021

[2] par ex. : D. Legeais, Droit des sûretés et garanties du crédit, LGDJ, 13ème éd., n° 85, p. 81

[3] Com. 17 mai 2917, n° 15-18.460, Bull. IV, n° 73

[4] articles R 261-1, R 261-21 et R 261-24 du code de la construction et de l’habitation